Clipse - Let God Sort Em Out - À partir de 30,95 €
C’est l’événement rap US de l’année. Le retour du duo Pusha T et No Malice sur des prods de Pharrell Williams après seize ans d’absence. Pour l’occasion, ils ont même décalé la sortie d’un an pour casser leur contrat avec Def Jam qui censurait le couplet de Kendrick Lamar. Le résultat est à la hauteur. Les deux frères de Virginia Beach rappent bien et fort. Leurs flows sont incisifs, leurs couplets extrêmement bien écrits, et cela, dès l’intro qui rend hommage à leurs parents décédés à seulement quatre mois d’intervalle. Les featurings prestigieux – allant de Tyler, The Creator à Nas – sont réussis et les compositions de Pharrell brillent, notamment sur le single « So Be It » avec son sample fou et ses drums reversed. Let God Sort Em Out ne réinvente pas le genre mais donne une leçon de maturité artistique et représente la vision du hip-hop grand public que l’on mérite. Il est donc malheureux de découvrir que les premières versions vinyles sont incomplètes. En cause, un sample et un featuring de dernière minute. De nouvelles éditions – complètes cette fois – sont prévues pour l’automne.

billy woods - GOLLIWOG - À partir de 41,99 €
Le Golliwog est un type de poupée de chiffon du xixe siècle représentant une personne noire en s’appuyant sur des stéréotypes racistes. En se réappropriant aujourd’hui cette figure, billy woods livre un nouvel album à l’écriture complexe, parfois cynique, mais toujours engagée. Il aborde dans ses textes des sujets difficiles comme le racisme systémique subi par les Afro-Américains, le génocide à Gaza ou encore les violences domestiques. L’album flirte avec l’horreur dans ses lignes comme dans ses productions aux boucles glaciales. Point d’orgue de cette funeste balade, « Waterproof Mascara » sample une boucle de femme en pleurs, accompagnée de bruits d’ambiance de château hanté, de jumpscares auditifs et de la voix terriblement grave de billy woods qui raconte sa fuite du Zimbabwe à 13 ans à la mort de son père. Il s’agit, déjà, de l’expérience rap la plus marquante de l’année. Pour l’écouter dans de bonnes conditions, s’enfermer chez soi et lancer le double vinyle noir est une excellente solution.

Tyler, The Creator - DON’T TAP THE GLASS - Sold out
« Body movement. No sitting still. » Ramener la danse dans le rap, c’est la mission que Tyler s’est donnée avec son neuvième album. Après le succès de CHROMAKOPIA, qui comprend ses textes les plus introspectifs, cet album est fortement inspiré du son Neptunes des années 2000. Pharrell apparaît d’ailleurs en featuring sous son ancien pseudo Sk8brd. Une influence que Tyler mélange aux talkbox du son funk West Coast. Se faisant, le rappeur de L. A. livre son album le plus fun depuis des années. Le disque est accompagné d’une imagerie léchée – comme à son habitude – tirant dans les styles vestimentaires de LL COOL J et de Ludacris au début du siècle. Dommage que l’album subisse, tel CHROMAKOPIA, une sortie vinyle bâclée, uniquement sur son shop, avec une mention « Test Pressing » mensongère et aucune information sur son contenu. On lui souhaite d’avoir, plus tard, une sortie en physique digne de ce nom.

Freddie Gibbs & The Alchemist - Alfredo 2 - À partir de 32,99 €
Alfredo Iᵉʳ du nom était l’une des collaborations les plus marquantes du début de la décennie. L’album réunissait les boucles chargées en samples de The Alchemist et le rap de gangster de Freddie Gibbs. Un projet à l’âme underground qui a rapidement rencontré un succès populaire jusqu’à être nommé aux Grammys. Si proposer un second opus aurait pu sonner comme un fan service décevant de la part de deux artistes très productifs, il n’en est rien. Sorti fin juillet, Alfredo 2 est beaucoup plus solaire que son prédécesseur. On reconnaît la patte unique de The Alchemist avec, cette fois, des samples de guitare sèche, de clavier onirique et de voix angéliques. Freddie Gibbs est, sans surprise, fidèle à lui-même avec son flow inimitable. Les visuels nippons de l’album se dévoilent avec un merchandising soigné, dont plusieurs versions vinyles avec des covers alternatives. Un univers maîtrisé à retrouver dans un court-métrage, réalisé entièrement au Japon et disponible sur YouTube.

Little Simz - Lotus - À partir de 33,99 €
Lotus de Little Simz est décevant. Décevant car la barre à atteindre après GREY Area, Sometimes I Might Be Introvert et NO THANK YOU était démesurément haute. Décevant car Inflo, le producteur de génie derrière les trois précédents opus, est absent. Ce dernier ayant préféré emprunter 1,7 million de livres sterling à Simz sans aucune intention de la rembourser. Le litige lui vaut l’agressive intro de l’album : « Thief ». Mais, « décevant » pour Little Simz signifie « excellence » pour le commun des mortels. Ce Lotus, symbole de guérison et de renaissance, pose la première pierre de la seconde partie de carrière de Simbi. Miles Clinton James, remplaçant d’Info, propose l’exploration de nouvelles identités, avec des influences soul, rock comme afro qui se mixent bien aux humeurs vengeresses puis auto-réparatrices de la rappeuse. Des sonorités sur lesquelles elle pose des flows plus calmes et réussit un virage introspectif. La renaissance du Lotus est à retrouver dans plusieurs versions vinyles auréolées d’une magnifique palette de rose et de noir.

ISHA - Drôle d’oiseau - À partir de 25 €
Rapper est vital pour ISHA. Si vous ne le saviez pas déjà, le rappeur bruxellois l’affirme haut et fort sur ce nouvel EP : « Si un jour j’arrête de rapper, c’est pire qu’une mort cérébrale. » Le projet transpire la maturité et la sincérité d’un artiste qui guérit doucement des traumas qu’il abordait sur La Vie Augmente. Et pour rester fidèle à lui-même, ISHA rejette le mainstream à l’aide d’un « f*ck » sur le septième titre. Une posture qu’il adopte dans son choix de prods, très sombres et émouvantes, mais qui ne l’empêche pas d’inviter des rappeurs désormais partie prenante de l’écurie du top singles : Dinos et Green Montana, qui peinent un peu à s’adapter à la couleur de l’EP. Comme ISHA le dit lui-même : « Ça va vendre du physique mais pas streamer des masses. » On vous conseille donc son vinyle orange translucide, un remède touchant certifié 100 % rap pour nous faire patienter jusqu’au deuxième volet – très attendu – de Bitume Caviar.
