La voix est âpre, l’autotune joue sur ses aspérités. L’interprétation est théâtrale et habitée sur une instru pesante, mélodramatique. « Gomorra » de SCH, premier single de sa mixtape introductive A7, et son clip tourné à la Scampia, à Naples, sont pour beaucoup d’auditeur·rice·s une porte d’entrée dans l’esthétique du rappeur d’Aubagne. Et peuvent soulever des interrogations : d’où vient ce look ? Cette gestuelle ? Cette manière de chanter la violence ? Mais surtout ce talent pour mettre en scène et en son l’illicite, autant avec nihilisme qu’en soulignant ses tourments moraux ?
Pour les plus avisé·e·s, SCH est déjà un nom connu via ses morceaux sortis chez Braabus Music (dont « La mallette », inclus sur le projet Booska Pefra, Vol. 1) et surtout ses titres mi-2015 sur le R.I.P.R.O Volume 1 de Lacrim, déjà tête d’affiche du rap français. Ces apparitions donnent des indications sur le contenu d’A7, mixtape deluxe sortant chez Def Jam France, label alors majeur, et naviguant entre affirmation du style de SCH et recherche de hits.

© Koria
Produite à moitié par l’équipe Katrina Squad et par celle d’AWA de l’expérimenté Kore (également réalisateur du disque), la mixtape déroule un rap crapuleux, scandé par une diction hachée et évoluant dans une imagerie funeste (aussi bien inspirée de Salif que de Furax). C’est notamment le cas sur les collaborations de l’artiste avec Katrina Squad, où l’influence de la drill de Chicago est perceptible dans ses inflexions vocales (Lil Durk en tête) comme dans certaines productions, mêlant rythmiques métalliques à diverses inspirations européennes (chants bulgares sur « A7 », clavecin sur « Mauvaises idées »).
Avec AWA, il signe ses premiers hits, ceux qui le propulsent déjà vers un succès grand public. C’est le cas de « Champs-Élysées » et sa boucle éméchée, idoine pour raconter l’ivresse des sommes vertigineuses, et de « Fusil », relecture aigre-douce du « Kno The Meaning » de Future, pour confier deuil et peine de cœur.

© Koria
Album qui ne dit pas son nom, A7 préfigure le futur flou dans les formats de disques à l’ère du streaming – on utilisera alors le terme fourre-tout « projets ». Mais surtout, la mixtape signe l’entrée par la grande porte de SCH, et pose les fondations de sa carrière et de sa discographie, parmi les plus éclatantes des dix années en vue.