Squidji : « Après l’ascension, il y a eu la redescente »

Après une période surproductive suivie d’un an de pause, Squidji est de retour. Le 1er mars, il dévoilait Antarctique, un projet de 17 titres, dans lequel il chante (presque) seul, du premier au dernier morceau. Pour Mosaïque, il se livre sur ses remises en question, le bilan de son premier album trois ans après et ses envies pour cette nouvelle étape de sa carrière. 

 

Le projet est sorti il y a quelques jours, quels sont les retours ? 

Ils sont principalement bons. Quelques personnes sont déçues parce qu'elles ont préféré Ocytocine [son premier album, sorti en mai 2021, NDLR], mais je me concentre sur le positif. Deux titres, « WHITNEY » et « JEUNE CROONER » ressortent beaucoup.

 

Tu as évoqué sur Instagram une période de doutes, de remises en question… Que s’est-il passé ? 

Tout d’abord, beaucoup de changements dans ma vie personnelle. Il fallait que je souffle. J’ai connu une ascension professionnelle, et derrière il y a eu la redescente. C’est une situation difficile que tout le monde vit, et là, c’était mon tour. J’ai voulu être dans le grand bain en travaillant avec Sony et j’ai adoré l’expérience. Ça m’a permis d’être plus discipliné. Maintenant, je suis de retour avec Believe où je me sens vraiment écouté. Antarctique, c’est mon moyen d’être en autarcie et de respirer un peu.

 
Cover d'Antarctique, réalisée par Jérémy Baudet

La cover d’Antarctique, réalisée par Jérémy Baudet

 

Quel bilan fais-tu d’Ocytocine trois ans après ? 

On a mis la barre très haute. C’est super produit, avec des bêtes de feats. C’est mon premier projet, je le défendrai toujours. Mais maintenant, j’ai envie d’aborder de nouveaux thèmes, de vraiment me livrer, de prendre plus de risques… C’est ce que je commence à faire avec Antarctique.

 

Ce n’était pas trop de pression d’arriver sous les projecteurs avec un projet aux featurings ambitieux, produits par des compositeurs renommés ? 

C’est sûr que c’était un gros challenge. Ce n’est pas tout le monde qui travaille avec ce genre de producteurs [Prinzly, Ikaz Boi, Paco del Rosso… NDLR]. L’avoir fait à 19 ans et partir en Belgique avec les « Avengers » comme je les appelle, c’était vraiment fou. Évidemment, ça m’a mis la pression, mais c’était beaucoup plus positif que négatif. Ça ne m’attriste pas de ne plus travailler avec eux. Si jamais je souhaite recollaborer, je peux toujours envoyer un message et ça se fait rapidement. C’est une chance. Sans Ocytocine, ils ne m’auraient peut-être jamais connu.

 

Sur Antarctique, c’est avec le compositeur Chrisuptown que tu as beaucoup collaboré. 

Quand Chris est descendu de Belgique pour qu’on travaille ensemble, on a tout de suite fait « JEUNE CROONER ». Sur ce son, tu sens que je m’amuse, que je suis libre. C’est ce que ça me fait de bosser avec lui. Alors, on est très vite passé de un à huit titres ensemble.

 
« Je veux vraiment que les auditeurs puissent se créer une bulle où leurs problèmes disparaissent. »
— Squidji pour Mosaïque
 

Tu prévois de faire de la scène ?

Bien sûr. J’ai déjà pu jouer quelques morceaux à Lyon, et j’ai vu que les gens se les prenaient. Ça m’a encore plus motivé. J’ai bientôt une date à Genève en acoustique live. 

 

Il y a un retour des lives acoustiques…

On est fatigués de l’autotune, des effets… Les gens cherchent vraiment de l’authenticité. Limite, des sons crasseux, avec des petits défauts de mix. Il y a un retour au naturel. 

 

C’est ce que tu tentes de faire avec ce nouveau projet ? 

C’est vraiment un projet de transition. Il y a les prémices de ce que je vais développer par la suite. Par exemple, la chorale sur l’outro. Je trouve que ça ajoute vraiment de la profondeur et qu’on ne le fait pas assez en France. C’est un truc que j’ai envie de pousser. Je vais continuer de me diversifier. Je m’entends super bien avec Vladimir Cauchemar, alors si je peux travailler un hit avec lui, ce serait lourd. 

 

Squidji. Crédit : Jérémy Baudet

 

Pourquoi as-tu choisi cette direction artistique « glacée » ? 

Tout part de l’idée de base : l’Antarctique. Un endroit où l’on peut être seul, prendre l’air et se calmer. Je veux vraiment que les auditeurs puissent se créer une bulle où leurs problèmes disparaissent. Qu’importe l’ambiance du morceau. Ils peuvent se mettre « JEUNE CROONER » au sport, « J’AIMERAI » en allant à l’école le matin… 

 

En 2017, tu disais que « chez les jeunes d’aujourd’hui, personne n’écoute un album de 17 sons ». Pourtant, c’est avec 17 titres que tu reviens !

J’ai hésité. Je me disais que c’était trop, mais j’en ai eu marre de tout garder pour moi dans mes dossiers. J’avais au moins 100 sons. Peut-être que certaines personnes trouveront le projet trop long, mais pour moi, il est cohérent. Le but, c’est que les personnes qui me suivent aient au moins 5 sons qui leur plaisent. Et puis on va bien défendre le projet. Il y a des clips qui arrivent.

 

Dans le mini-documentaire réalisé pour la sortie d’Ocytocine, tu disais t’inspirer de tes ami·e·s pour écrire. Tu as décidé de te concentrer sur toi cette fois-ci ?

Dans ce projet, c’est vraiment ça. Il y a même pas mal de sons que j’ai pris du temps à digérer parce qu’ils évoquent des sujets très personnels. Sur « SANS MOI », par exemple, je parle de mon ex, et c’est parfois dur de se replonger dans cette histoire. Par contre, cela me fait plaisir de la partager. Il y a sûrement des personnes qui se reconnaîtront. C’est quand tu vas vraiment loin que tu touches le plus de personnes. 

 

Squidji. Crédit : Jérémy Baudet

 

Le projet est très intime aussi parce que tu chantes quasiment seul tout du long.

Comme je considère Antarctique comme un projet de transition, je ne voulais pas faire de feats. Ça faisait trop longtemps que je n’avais rien sorti, il fallait que ceux qui me suivent aient un projet que je porte seul. Il y a une seule collaboration, avec Yaïr, sur l’intro. Quand je les ai vus au studio, avec leurs sourires, leur manière de travailler, leur polyvalence… j’ai tout de suite accroché. L’alchimie a vraiment opéré, on a fait deux morceaux. C’est aussi une manière de leur donner de la force. 

 

Et tu connais bien ces ambiances de groupe, toi qui rappais à l’époque avec Roshi.

J’aimerais bien qu’on fasse un projet commun d’ailleurs ! On se voit toujours en soirée et on se soutient quand nos projets respectifs sortent. On pourrait boucler la boucle avec un petit EP ensemble. C’est dommage que les groupes ne se reforment pas plus. Mais c’est vrai que ce n’est pas la même dynamique. Tout le monde n’a plus forcément la même vision, ou le même rythme de travail… Parfois, il faut faire des choix. Pour ma part, c’est toujours dans un coin de ma tête, ça ne peut qu’être bénéfique.

 

Pour rester sur les collaborations, tu as plusieurs fois évoqué ton rêve de travailler avec GIMS, c’est toujours le cas ?

Je fais mon truc de mon côté, et peut-être qu’un jour ça tombera dans l’oreille de quelqu’un qui travaille avec lui. En tout cas, je ne vais pas forcer le destin. Ce n’est pas bon, surtout dans la musique. GIMS n’est pas beaucoup cité comme une inspiration par la nouvelle génération, mais il est trop chaud. Sa transition vers le chant est réussie, il a même fait de l’opéra. J’aime comment la France le respecte aussi. Il est invité à manger par Macron, il fait partie des personnalités que les Français aiment le plus… C’est assez rare. Il y a aussi Nekfeu que j’aime bien. On vient tous les deux du XVe arrondissement, je l’ai déjà croisé et je sais qu’il aime bien donner de la force aux rappeurs de chez lui. Mais bon, là je crois qu’en ce moment, il est parti méditer avec des moines en Inde [rires]. C’est un truc à faire une fois dans sa vie ça !

 

Il y a d’autres choses que tu aimerais absolument faire ?

J’aimerais bien avoir des expériences de milliardaires comme quand Zuckerberg va se forger une épée avec un maître forgeron japonais, ou alors méditer avec les hommes les plus sages du monde… Avec de l’argent, je tenterai de vivre ce genre de moments plus intimes. 

 

Ça te tient à cœur de travailler ta spiritualité ? 

Je pense qu’on est tous amenés à le faire. Du moins, pour ceux qui y croient. C’est encore plus flagrant chez ceux qui n’ont rien. Je ne sais pas comment c’est possible de tenir dans ces situations sans la spiritualité. Moi ça va, j’ai ma famille, j’ai mes potes… Mais je pense que c’est toujours une bonne chose pour structurer sa vie.

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