James Loup : « L’enjeu de Nouvelle École, c’est de faire comme si ça n’était jamais arrivé »

Candidat remarqué de la troisième saison de Nouvelle École, James Loup est le produit d’une génération forgée par la technique et les rimes multisyllabiques des open-mics lyonnais. En janvier 2021, le rappeur s’était déjà confié à Mosaïque pour la sortie de l’un de ses premiers projets. Quatre ans plus tard, nous retrouvons un artiste affirmé et réaliste vis-à-vis de la lumière que lui offre Netflix. Pour sa première interview depuis son élimination lors de l’épreuve des battles, il nous dévoile les coulisses de son parcours dans l’émission et la suite de sa carrière qu’il espère voir enfin décoller.

 

La troisième saison de Nouvelle École est bientôt intégralement sortie. Comment vas-tu ?

Je vais très bien. Je suis un peu fatigué et chahuté par le tsunami actuel, mais en vrai ça va. Avec les autres candidats, on s’attendait tous à une tornade, mais tant que c’est pas sous nos yeux, on ne peut pas imaginer ce à quoi on va avoir affaire. C’est surtout sportif sur les attentes qu’on a côté musique, et sur cette pseudo notoriété qui pop du jour au lendemain. On essaye de se servir le plus possible du moment pour transformer l’essai. Ça fait des années que j’attends un truc comme ça. 

 

Tu rappes depuis déjà près de 7 ans. Pourquoi avoir participé à un programme comme Nouvelle École ?

Ce qui m'a convaincu, c’est mon manager, Vestiges. Je venais de mater la saison 2 et je voyais ça comme un truc impalpable, qui ne sortait pas de Netflix. Quand on me contacte, je ne vois même pas le message. Finalement, c’est Vestiges qui répond de son côté et on lui explique qu’il va y avoir des nouveautés cette année. Il m’a persuadé qu’il fallait tenter le coup parce qu’on est confronté à un manque de visibilité sur chacun de nos projets et que ça ne coûte rien. Je n’avais pas envie de cultiver des espoirs, alors j’ai participé au casting sans attente. Je pense que c’est ce côté « rien à perdre » qui leur a plu. Ils ont compris que ma survie ne dépendait pas du programme. 

 

Comment se passe la sélection ?

Le processus est méga long. Ça commence en mai et on a une réponse définitive en septembre. On a eu des indicateurs assez positifs de la production et on avait la sensation que mon profil plaisait. Ensuite, une fois que ça a commencé, j’ai réalisé que je n’étais pas capable d'être acteur d'une télé-réalité. Par contre, je me suis dit que le prétexte de tout ça, c’était le rap. Le fait de ne pas avoir le droit à l’erreur, ça met une pression de fou. Le seul moyen de tenir mentalement, c’était la musique. Quand je m’accrochais au public, ça faisait descendre un peu le stress et je trouvais un sens à ma présence avec ces dizaines de caméras qui filmaient chacun de mes faits et gestes. 

 

© Noémie Lacote

 

Tu t’es entraîné avant de venir sur le tournage ?

Bien sûr. Mais il faut savoir qu’on reçoit les prods seulement quelques jours avant, ou même quelques heures sur certaines épreuves. Tout ce que je savais, c’était le contexte et le type de texte qu’il fallait lâcher. J’en avais une dizaine avec moi, sur pleins de BPM différents, pour pouvoir dégainer le meilleur au bon moment. J’ai pris au sérieux la préparation. Je voulais aussi un truc pour accrocher le jury dès le début. Cette petite pic à SCH, c’était stratégique, je voulais communiquer avec l'écosystème dans lequel j’étais plongé. 

 

Tu es passé en premier lors des auditions devant les jurys. Comment as-tu vécu le moment ? 

Ils font vachement monter la pression. On a presque pas de balance, juste un test soundcheck qui est aussi filmé. Avant de monter, c’est une petite torture mentale parce qu’on se fait tous des scénarios horribles. Mais au moment où je pose mon pied sur la scène et que j’ai le micro dans la main, je me sens à ma place de fou. Je me suis éclaté comme sur n'importe quelle autre scène. Ceux qui ne sont pas fondamentalement accrochés à leur art à ce moment-là, je ne sais pas comment ça peut bien se passer. La seule échappatoire, c’est de s’accrocher à sa raison d’être. 

 

Lors d’un entretien accordé à Mosaïque en avril 2021, tu présentais SCH comme l’un de tes artistes préférés. Ça devait être spécial, non ? 

Grave. La production fait en sorte qu’il n’y ait aucun contact entre les talents et le jury. Je l’ai rencontré sur scène. Et là, j’étais obligé de délaisser complètement le fait que j’avais beaucoup écouté sa musique. T’es obligé de te dire que Rooftop et A7 c’est des trucs qui n’existent pas [rires]. Sinon, tu fais un AVC sur place. 

 

Sur l’épreuve des cyphers, tu as eu un rôle important en tant que capitaine avec Youssef Swatt's, Durden et JYEUHAIR. Comment as-tu géré cette mission ? 

Après coup, je me suis dit que c’était presque mieux pour moi. En tant que capitaine, j’étais presque aussi concentré sur l’équipe que sur moi-même. Je voulais prendre le rôle au sérieux. J’avais choisi les gars de la team et je ne voulais pas qu’ils soient éliminés à cause de mon choix. Je ne pense pas que ça soit à cause de ça que je bafouille… C’était plus le manque de temps, de préparation, et de sommeil. Mais il y a un truc humain qui s’est passé entre nous quatre, on était dans notre bulle. 

 

© Noémie Lacote

 

Tu retrouves ensuite Youssef Swatt's en battle. Comment est-ce que tu analyses ta défaite après-coup ? 

Tomber sur quelqu’un avec qui tu t’entends bien humainement, ça permet au combat d’être fair et pas à base de coup de bas. On ne voulait pas se faire de mal, plutôt se démonter avec le smile. J’étais serein et j’avais l’impression d’avoir un bon texte. C’est le jeu. 

 

Et ça s’est joué à peu de chose !

Je suis corda avec ce que dit SCH lors du debrief [« Quand tu étais sur la prochaine phase, je réfléchissais à celle d’avant, parce que tu as joué sur la technicité, c’était plus dur de te capter. »] J’ai cette façon d’écrire, avec plusieurs couches d'oignons dans mes textes. Ça dessert forcément un battle qui demande des coups de poings qu’on se prend direct. Youss’ a été bon et efficace. 

 

Comment as-tu vécu le tournage ? 

Le plus dur, c’est l'attente. Tu arrives tôt le matin, tu repars tard le soir, et dans tout ça, tu as une minute vingt de rap qui va jouer sur toute ta vie derrière. Le plus fatiguant, c’est de garder le mental toute la journée, de rester concentré et de ne pas avoir un excès de confiance. J’ai fait une première partie peu après l’émission, et le degré de stress, c’était de l’eau à côté ! On se le dit avec les autres, les scènes que tu fais ensuite, tu as l’impression que c’est la belle vie. 

 

Qu’est-ce que tu retiens de cette expérience ? 

Tout l’enjeu de cette émission, c’est de faire comme si elle n’était jamais arrivée. C’était l'exercice numéro un après le tournage. Plus d’hôtel, plus de taxi, retour à la réalité. Inconsciemment, on peut se dire que tout est fait, on est sur Netflix, on va avoir plusieurs milliers de streams… Il faut revenir à la réalité et continuer comme avant, en attendant de voir si ça va être un plus. En tout cas, c’est un gros coup de pouce de la vie qui va peut-être me permettre d'accélérer certaines choses. Les gens m’identifient et c’est déjà énorme. Mon cauchemar, c’était de finir ma carrière dans la musique sans que personne n’ait pu checker ce que je fais. Et même si les gens détestent, je préfère ça !

 

Lundi dernier, tu as dévoilé un morceau, « 3 DÉFAUTS ». On imagine l’importance de ce premier single depuis que tu as été révélé dans l’émission. Comment a-t-il été choisi ?

On voulait un titre qui représente le plus possible ce que je suis musicalement. L’ADN qu’on va développer derrière. Ce titre est sorti naturellement parce qu'il n’a pas de refrain, il n’est pas forcément très catchy, mais surtout il est fidèle à nous. Ceux qui montent dans le train découvrent un truc qui ne va pas bouger. Je me présente aux yeux de tous sous la forme d’un entretien et mes trois défauts c’est juste que je suis buté de son, que je m’en branle du taff qu’on me propose, et que je vais continuer toute ma life. C’est la liberté, c’est l’envie de s’envoler. 

 

Dans le morceau, tu parles de ta vraie vie, à quoi ressemble la réalité de James Loup, post-Netflix ? 

Financièrement, je ne suis pas du tout à l’abri. J’ai encore tout à prouver pour dire que c’est bon, c’est fait. Je mets tout en œuvre pour continuer à proposer de la musique. C’est le seul objectif. J’espère pouvoir avoir l’intermittence et je suis toujours face à des réalités de taff. Mais avec ce qu’il se passe, j’alloue forcément beaucoup plus de temps à la musique qu’avant parce qu'il le faut, c’est le jeu. Il y a des prêts à la banque qui sont faits et d’autres trucs comme ça. On verra jusqu’où ça va. 

 

© Noémie Lacote

 

Est-ce que tu bosses toujours dans ta caravane ? 

Absolument. Je vais y passer l’été. Elle me manque. Je l’ai plus vue sur Netflix qu’en vrai récemment parce que je suis beaucoup à Paris. J’y retournerai dès que possible !

 

Qu’est-ce que tu prépares pour la suite ? 


On va sortir un EP en septembre. Il y aura aussi d’autres visuels et l’envie de jouer sur scène. Je continue à faire tout ce que je fais déjà depuis six ou sept ans, en espérant qu’il y ait un peu plus de gens sur Spotify et dans la fosse.

 

Celle et ceux qui te découvrent ne le savent pas encore, mais tu as une appétence pour l’image et tu réalises tous tes clips. Est-ce que tu continueras à être de l’autre côté de la caméra ? 

Écrire mes clips, c’est toujours très important et ça ne va pas me quitter parce que c’est tout aussi personnel que quand je suis en studio. J'aurai toujours envie de réaliser ou de coréaliser mes clips avec Vestiges. Peut-être qu’un jour je serais trop pris par le son et qu’il prendra les reines là-dessus. Pour le moment, on travaille toujours ensemble.

 

Que peut-on te souhaiter pour la suite ? 

Je vais passer l’été à faire du son et je vais retrouver la fraîcheur de ma caravane. Je serai là en septembre avec de la musique à défendre et les ambitions d’un loup affamé !

 

La finale de Nouvelle École sera diffusée dimanche. Tu connais déjà le résultat, mais est-ce que tu soutiens quelqu’un·e en particulier ?

Youssef, c’était mon gars dans l’émission, humainement gros soutien. Artistiquement, je ne me positionne pas. Que le meilleur gagne, et je pense que le meilleur gagne. 

 

Un mot de la fin ? 

Merci Mosaïque pour le soutien depuis des années. Allez voir « 3 DÉFAUTS ». On est ensemble. 

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